07.

— Personne répond à mes textos.
— On s’en fout. Ferme tes yeux. Imagine-nous au milieu du désert. Tes cheveux volent autour de ta tête. Ta chemise nouée à la taille, tu fumes une cigarette près de la voiture. Ta peau a bronzé depuis cinq jours. Je suis assise dans le sable noir. Je bois de l’eau d’une gourde kaki. Une gourde de l’armée. Nous avons des bottes de cuir. Nous sommes une guérilla. Nous sommes à Black Lake. Guérilla Black Lake. Conjoncture de tous les possibles.
— Notre mantra : tous les possibles sont possibles.
— Tous les possibles sont possibles.
— JE T’AIME, FUCK QUE JE T’AIME.
— Bye le monde. On se crisse de toé, le monde.

***

— Pourquoi Black Lake?

— Je sais pas. Je l’ai vu sur une carte. Black Lake, ça sonne bien.
— Il doit y avoir un lac plein d’huile à moteur.
— Des mines, certainement.
— Des mines et des morts.
— Des meurtres.
— Des meurtres, yeah!
— Des meurtriers.
— Le meurtrier de Laura Palmer.
— Le cadavre de Laura Palmer dans un sac.
— Une femme avec une buche.
— On va là!
— Pas le choix.

***

— Frankie? Dors-tu?
— Non.
— Qu’est-ce que tu fais?
— Je pense.
— Tu penses à quoi?
— Ah, hum… C’est confus. Je pensais à ramasser l’eau de pluie de mes gouttières pour me doucher parce que le chlore dans l’eau de la ville fait pâlir mes cheveux. Ça expliquerait pourquoi la pointe blondit toujours même si je n’utilise pas de camomille. Même l’hiver et aussi quand je porte une tuque et que le soleil ne m’atteint jamais parce que de toute façon l’hiver je ne sors pas de chez moi ou très peu, seulement pour aller me chercher du café ou du pain. Mais ça n’arrive presque jamais parce que j’ai des amis qui le font pour moi, à ma place. Ils font juste mettre le café devant ma porte et sonnent-décrissent. Je sais que c’est eux qui viennent parce que qui d’autre connait ma sorte de pain.
— Je voudrais dormir. Je ne me sens pas bien.
— Ok, concentre-toi sur ta respiration. Mets ta main sur ton ventre. Compte avec moi. Un. Deux. Trois. Quatre. Cinq. Six. Sept…


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